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Epoque préhistorique

Dès l’origine, l’homme s’est installé sur ces terres situées au bord du Tarn, ce réservoir d’eau et de poissons, ce chemin vers la plaine d’Aquitaine.

Le premier mode d’habitat depuis l’homme néolithique, il y a plus de 6000 ans, est l’habitat dispersé. Nous connaissons l’histoire de ces premiers hommes au travers des découvertes archéologiques.

Haches de l'époque préhistorique

En 1966, seize haches, puis trois autres par la suite, furent découvertes dans une vigne à la limite des communes de Castanet de Castelnau-de-Lévis. (Galerie Archéologique du Musée Toulouse Lautrec à Albi).

Epoque Celtique :

Aux sites préhistoriques, ont succédé des habitats gaulois.

Vers – 450, les celtes « le premier peuple de l’Europe préhistorique à sortir de l’anonymat », quittent leur région d’origine et arrivent par petits groupes. Partout ils trouvent des peuplements antérieurs. La vallée du Tarn sert de voie de pénétration.

Agriculteurs, les Celtes étaient aussi des artisans, habiles à fabriquer de belles poteries en céramique aux dessins géométriques. Les Celtes de notre région, les Ruthènes (du Rouergue) comme les peuples voisins, les Volques (du Toulousain) étaient riches en or et en argent . Leurs monnaies, à la croix des Volques et au sanglier chez les Ruthènes, nous le prouvent comme le trésor retrouvé à « la Crouzatié » (Sainte-Croix).

En 1949, de nombreux ossements et des poteries sont exhumés à « La Ravailhé ». Sur un carré de 50 mètres, apparaît une nécropole à incinération d’une quarantaine d’urnes funéraires appartenant à la civilisation celte. Des objets de bronze et  de céramique s’y trouvent également (vaisselle peu résistante, de mauvaise qualité à la pâte grossière, les décorations étant réservées aux urnes funéraires).

Lors de ces mêmes fouilles, apparaissent une nécropole à inhumation où les squelettes étaient orientés vers l’Orient, puis une fosse hémisphérique avec des ossements d’animaux datant de l’époque gallo-romaine.

Epoque Gallo-romaine :

Après la période de conquête où les Ruthènes et les Volques s’étaient unis pour lutter contre les Romains, les gaulois ont été séduits par le style de vie de l’occupant.

Le semis de noms en « ac » dénonce l’emplacement de villas gallo-romaines.

Au centre d’un domaine composé de champs, de prairies et de bois aux essences variées, une villa couvrait près d’un hectare et possédait de nombreuses pièces groupées autour d’une cour. L’habitation s’ornait d’une aile thermale avec les trois piscines classiques : bain froid, bain tiède, bain chaud, ces derniers étant chauffés par un hypocauste (chauffage par le sol). Les sols étaient couverts de mosaïque, les murs couverts de fresques. Le reste de la maison avait son propre système d’hypocauste et possédait des vitres, objets assez rares à cette époque.

Un autre ensemble de bâtiments abritait les ateliers, les étables, l’écurie, les hangars et le logement des serviteurs. La villa regroupait certaines industries rurales qui lui permettaient de vivre en économie fermée. Il y avait une forge, un atelier de menuisier, de charron, des métiers à tisser. On broyait le grain dans des meules de grés mues à la main. Les métiers à tisser indiquent le travail de la laine, du lin et du chanvre.

A Castelnau-de-Lévis, « le Port » et « les Mirgouzes », sont d’antiques lieux d’habitation où subsistent les soubassements d’un port fluvial reliant Castelnau-de-Lévis à Terssac. D’après Ausone, écrivain de l’époque gallo romaine, le blé de la région était exporté par le Tarn. Le port desservait vraisemblablement une villa aux « Mirgouzes » où les nombreux silos permettaient d’entreposer les grains avant leur expédition par la rivière.

Le Haut Moyen Âge - L’Epoque des invasions barbares:

Les suffixes en « ens » dans les noms locaux datent des wisigoths dont les bandes commencent à déferler au Vème siècle.

Epoque troublée, obscure, qui marque du Vème au VIIème siècle, le déclin de la civilisation antique et les prémices de l’époque médiévale.

Lorsque les barbares arrivèrent sur le territoire albigeois, ils se trouvèrent face à un pays en pleine transformation par la fin de la romanisation et le début de la christianisation.

Face aux pillages des bandes d’envahisseurs, les paysans abandonnèrent leurs domaines pour se réfugier sur des hauteurs moins accessibles. La pression germanique finit par l’emporter.

En 418, les wisigoth s’installèrent dans la région et apportèrent une nouvelle organisation politique : le royaume de Toulouse. En 507, la défaite et la mort d’Alaric II, roi wisigoth devant Clovis à Vouillé, marquèrent la fin du royaume de Toulouse. L’Albigeois constitua alors une zone frontière mouvante et fut définitivement acquis aux Francs en 635.

A la même époque, les propagateurs de la foi chrétienne parvenaient en Albigeois. La première mention historique d’un évêque à Albi remonte à l’an 406. L’institution semble bien établie à la fin du VIème siècle avec Saint Salvi, évêque d’Albi.

L’évangélisation des campagnes s’effectua à partir des monastères de Vieux-sur-la-Vère et de Troclar à Lagrave.

Sur le territoire de Castelnau, à cette époque du haut Moyen Âge, existait un habitat dispersé : petits villages ou hameaux le long du Tarn, dont il ne reste souvent que des noms sur le cadastre.

De « San Daunis », dont Rossignol au XIXème siècle apercevait dans le Tarn les restes d’une chaussée, de tours et des cercueils de pierre qui avaient glissé dans les eaux, il ne reste que l‘appellation d’un champ.

Il en est de même « d’Abirac » qui avait une église consacrée à Saint Pierre. Des travaux de terrassement ont fait apparaître un cimetière où les squelettes bien alignés étaient orientés vers l’est.

« Queyre » fut un village qui appartint au chapître de la cathédrale d’Albi. On y voit les substructures exhumées de son église.

« Jussens » fut aussi un village autour de son église.

Seul « le Carla », donné en 1169 par Pierre de Mazières à la commanderie de Rayssac, garde son église.

Tous ces lieux d’habitation furent incendiés, détruits lors de la Croisade contre les Albigeois menée par Simon de Monfort. Les communautés de paysans durent se mettre sous la protection des féodaux en période de forte insécurité.

La naissance de Castelnau de Bonafous:

Du Xème siècle au début du XIIIème, les Comtes de Toulouse ont assis leur puissance sur un vaste territoire s'étendant du Rhône à la Garonne. A l'aube du XIIIème, le Comte de Toulouse, Raymond VI dirige un "état toulousain" pratiquement indépendant et le plus grand fief du Midi. Mais la croisade contre les cathares, qui commence en 1209, va provoquer le démembrement du puissant Comté de Toulouse. En 1229, le Comte Raymond VII doit accepter les dures conditions du Traité de Meaux : il cède au roi Louis IX tout le duché de Narbonne et la partie de l'Albigeois située sur la rive gauche du Tarn. Il garde le Toulousain, l'Agenais, le Quercy, le Rouergue et l'Albigeois situé sur la rive droite du Tarn. Jusqu'à sa mort en 1249, Raymond VII essaie de rétablir son autorité et de réorganiser son territoire. Il fonde de nouvelles bastides : en 1222, Castelnau de Montmiral, puis Cordes qui remplace Saint Marcel détruit par Simon de Montfort en 1229, et Lisle d'Albigeois (Lisle-sur-Tarn) qui remplace le village de Montaigut. La même année, son ministre, Doat Alaman, acquiert Labastide de Montfort, aujourd'hui Labastide de Lévis, et Labastide du Mont Alaman (Villeneuve sur Vère) qui remplace Lagardelle détruite - elle aussi - par Simon de Montfort et dont il ne reste que l'église sur la route de Cordes. Le 17 Janvier 1234, au palais narbonnais de Toulouse, Sicard Alaman et son frère Déodat se partagent l'héritage paternel devant notaire public.

 Le sceau de Raymond VII                       

« Nous Raymond, par la grâce de Dieu Comte de Toulouse, donnons et concédons en fief à notre cher et fidèle Sicard Alaman et à ses héritiers et successeurs un puy sis dans le diocèse d’Albi pour y édifier un château ou un ville. Ce puy s’appelle le puy de Bonafous et il est entouré d’un territoire et de dépendances  s'étendant du ruisseau de Luzert au pont de Bernac et à Notre Dame de la Drèche. Nous concédons à tous ceux qui habiteront le dit puy d'être libres et exempts de toutes quêtes, excepté que, dans le château et ses dépendances, nous retenons pour nous l'albergue avec cent cavaliers une fois par an. En outre, nous retenons deux chevaliers et trois éccuyers pour chevauchée ou ost quand nous l'exigerons. Pour mémoire, nous avons fait munir la présente page de notre sceau.»

Ce partage est confirmé par Raymond VII et scellé de son sceau. Devant les mêmes témoins, le même jour, Raymond VII fait don de la terre de Bonnafous qu'il tient de l'Evêque d'Albi à son ministre et conseiller Sicard Alaman, afin d'y construire un castelnau. Il s'agit là aussi de remplacer les villages le long du Tarn, détruits par Simon de Montfort: le Carla, Abirac, San Daunis et Jussens.
 

Les Alamans (XIIIèME siècle)

Sceau de Sicard Alaman

Le nom d’Alaman apparaît, pour la première fois, dans la première moitié du XIIème siècle, mêlé aux signataires d'un document concernant Gaillac. Les Alaman sont originaires de Penne et possèdent des biens dans la ville d’Albi. Les vicomtes d’Ambialet et d’Albi, les Trencavel, leur ont confié droit de regard sur le château du Castelviel. Dans les différends entre pouvoir vicomtal et pouvoir épiscopal, on s’en remet à la transaction des Alaman. Le père de Sicard, Doat Alaman, avait eu la confiance de Raymond V et Raymond VI qui l'avaient comblé de faveurs. A sa mort en 1234, c'est une succession fabuleuse que se partagent Sicard et son frère Déodat. Créé baron par Raymond VII dans la cour plénière tenue à Toulouse pendant les fêtes de noël 1244, Sicard Alaman joue un grand rôle auprès du dernier comte de Toulouse et du duc Alfonse, son gendre. Raymond VII le charge de l'administration de ses biens et le met au nombre de ses exécuteurs testamentaires. Après la mort de Raymond VII, il est nommé vice‑régent et sénéchal de tout le comté. Au retour de la croisade du duc Alfonse et de sa femme Jeanne, ces seigneurs le chargent de rédiger les coutumes qu’ils ont octroyées à la ville de Toulouse. En relation avec les souverains de l'époque, lié d'amitié avec le pape Clément V qui avait été chancelier de Raymond VII, Sicard Alaman est un des plus riches seigneurs de XIIIè siècle. Aux domaines considérables que son père lui a laissés, il ajoute Castelnau de Bonafous qui aura le titre de baronnie, ce qui lui donne droit d'entrée au Etats Provinciaux du Languedoc. Sicard se maria trois fois. Avec Philippa, il eut 2 filles : Alix, mariée à Amalric de Lautrec et Cécile, mariée à Adhémar, seigneur de Lombers et Brens. Avec Béatrix de Lautrec il eut un fils, Sicard II, qui lui succéda et une fille, Agnès, mariée à Arnaud, seigneur de Montaigut (Lisle Sur Tarn). D’un troisième mariage avec Béatrix de Mévouillan, il eut une fille Marguerite qui entra au couvent. Sicard mourut en 1275, quatre ans après les derniers comtes de Toulouse. Son fils, Sicard II lui succède peu de temps.

En 1280, c'est Bertrand, vicomte de Lautrec, oncle maternel de Sicard II, qui devient seigneur de Castelnau. 

La Charte de Franchises de Sicard Alaman

  

 

        En 1256, Sicard Alaman octroie aux habitants de Castelnau de Bonafous, une charte, La Charte de Franchise, qui est conservée aujourd’hui aux Archives Départementales et qui règle la vie de la communauté dans tous ses détails.

(Ci-contre étui contenant la Charte des Franchises conservée aux Archives Départemantales du Tarn.) 

 Les Raymondins de Bonafous

Castelnau, dans le projet de Sicard Alaman, doit avoir une monnaie, ce qui est l'apanage des cités dominantes.

On frappe monnaie à Albi depuis le XIème siècle : le droit en appartient au vicomte, à l'évêque et au comte de Toulouse.

          Ecu médiéval

Un accord intervenu le 21 juillet 1248 substitue au vicomte d'Albi, Trencavel, disparu dans la tourmente de la croisade, Sicard Alaman, qui obtient que la monnaie soit frappée au château de Bonafous : ce sont des « raymondins » utilisés dans les diocèses d'Albi, Cahors et Rodez.

En 1278 l'atelier est transféré à Albi.

A la fin du XIIIème siècle le pouvoir royal s'efforce de faire disparaître les monnaies locales au profit de la seule monnaie royale.
 

 Les Lévis (XIVème et XVème siècle)

Bertrand de Lautrec n’eut qu’une fille, Béatrix, héritière de ses nombreux domaines. Elle épousa, en 1297, Philippe de Lévis, descendant d’un compagnon de Simon de Montfort. Peu de temps après son mariage, Philippe 1er de Lévis assiste à la bataille de Courtrai livrée par Philippe le Bel aux flamands en 1302 où périt l’élite de la chevalerie. Philippe de Lévis échappe à cet horrible désastre mais meurt en 1304. Les Lévis ne font que passer à Castelnau : ils sont au service du roi. Son fils Philippe II se distingue dans les guerres de Flandres puis de Guiyenne (1326) et le roi lui accorde quelques privilèges en récompense.

Tous ces seigneurs de Lévis se distinguent successivement pendant les guerres contre les anglais aux XIVème  et XVème siècle. Philippe IV se distingue sous les règles de Charles VI et de Charles VII.  A la bataille de Montargis (1426), il se bat auprès de Jeanne d’Arc et entre avec elle à Orléans. Son fils Antoine est un fIdèle chevalier de Charles VII mais il dilapide l’héritage des Lévis. Le 9 août 1460, Jean de Lévis vend à Jean d’Armagnac, comte de Comminges, la châtellerie de Castelnau avec les terres qui en dépendent : Castanet, Bernac, Sainte-Croix et Saint-Sernin. Le frère de Jean de Lévis meurt sans postérité en 1494. avec lui s’éteignait  cette illustre lignée qui, par alliance avec les vicomtes de Lautrec, avait possédé de vastes domaines dans l’Albigeois, notamment la seigneurie de Graulhet.
       

Les Amboise-Aubijoux (XVIème siècle)

Par son union avec Madeleine, fille unique de Jean d’Armagnac et maréchal du roi Louis XI, Hugues d’Amboise, seigneur d’Aubijoux devint le nouveau seigneur de Castelnau sous Charles VIII et Louis XII.

Frère de Louis d’Amboise, évêque d’Albi et de Georges d’Amboise, cardinal archevêque de Rouen, premier ministre de Louis XII, il parvint aux plus hauts emplois dans l’administration et l’armée.

Capitaine d’une compagnie d’arbalétriers, il accompagna le roi Charles VIII dans les guerres d’Italie. Il fut gouverneur de l’Armagnac, sénéchal du Roussillon et lieutenant général du Languedoc.

De ses trois fils, le seul survivant, Jacques, devint seigneur de Castelnau sous le patronyme  « d’Aubijoux » du nom d’une terre auvergnate.

Le 20 juin 1536, Jacques d’Aubijoux se fait tuer au service du roi en défendant Marseille, assiégée par Charles Quint.

C’est son fils posthume, Louis d’Aubijoux, qui devint son légataire. En 1542, il est page de François 1er. Il sera gouverneur des diocèses d’Albi, de Castres et de Lavaur, colonel des légionnaires du Languedoc.

En 1556, il épouse Blanche de Lévis, fille du comte de Ventadour.

Ainsi, après plus d’un siècle et après quatre générations, le conflit entre les Lévis et les Armagnac à propos de la vente de Castelnau se trouvait enfin réglé.

Louis d’Amboise habita le château de Castelnau qui subit alors des aménagements et des embellissements.

A sa mort en 1614, son fils Françoise d’Aubijoux, relevé de ses vœux de chevalier de Malte, lui succède et épouse Isabelle de Lévis. Proche de Henri II de Montmorency qui fut exécuté dans la cour du Capitole à Toulouse en 1632, il su être prudent, rester neutre dans les luttes des partis et rester fidèle au roi.

En 1637, son fils François Jacques d’Aubijoux lui succède. Proche de Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII, il est lieutenant général du Bas Languedoc et protecteur de Molière lors de son séjour en Languedoc. Il sera de tous les complots contre Richelieu et, au moment de l’arrestation de Cinq-Mars, il fuira en Angleterre.

Le premier soin de Gaston d’Orléans nommé gouverneur du Languedoc fut de confier les pouvoirs à trois lieutenants généraux. Parmi eux, le comte de Bioules, seigneur de Gaix, sénéchal de Castres, s’occupe du Haut Languedoc.

Aubijoux, seigneur de Castelnau et de Graulhet, devient alors gouverneur de Montpellier et a le Bas Languedoc sous sa coupe.

Tous deux, complices, font partie de la noblesse languedocienne très remuante et ont rapporté de leur exil en Angleterre le goût des jardins qu’ils développent au château de Gaix et au château de Crins.

Ce train de vie de grand seigneur coûte fort cher et tous les moyens sont bons pour collecter des fonds : droits féodaux, appointements, gratifications…

Aubijoux fait profession de libertinage auprès du Prince de Conti et du Duc d’Orléans chez qui se retrouvent tous les languedociens. Aubijoux y contractera la petite vérole, puis la pelade dont il mourra.

En 1655, Aubijoux doit se retirer sur ses terres où il reçoit ses amis et, parmi eux, Molière. Il meurt le 9 novembre 1656

A la mort de François Jacques d’Aubijoux, sa sœur Louise recueille les terres albigeoises qui lui appartenaient. Elle avait épousé le 13 mai 1637 Jacques de Crussol Saint-Sulpice, de la maison d’Uzès.

Le mariage avait été célébré dans la salle d’armes du château de Castelnau transformé en chapelle.
 

Les Crussol Saint Sulpice (XVIIème et XVIIIème siècles)

Le nouveau seigneur de Castelnau est Jacques de Crussol.

Il est le fils d’Emmanuel de Crussol, duc d’Uzès, qui avait épousé en 1601 Claude d’Ebrard de Saint-Sulpice, dernière héritière d’une célèbre famille originaire de Saint-Sulpice dans le Quercy en présence de l’évêque d’Albi, Monseigneur Gaspard de Daillon de Lude.

Jacques de Crussol, marquis de Saint Sulpice, mourut à Cahors en 1679.

Son fils aîné, Emmanuel-Charles eut le marquisat de Saint-Sulpice, la baronnie de Castelnau et la seigneurie de Graulhet. Il épousa en 1671 Charlotte de Cron, fille d’un conseiller du roi, second président au Parlement de Toulouse.

Cette dernière appartenant à la noblesse de robe, Jacques de Crussol s’était longtemps opposé à ce mariage avant d’y consentir.

Emmanuel-Charles mourut à Albi en 1694.

Son fils aîné, Etienne de Crussol, acheta un régiment d’infanterie, partit rejoindre l’armée française aux Pays-Bas et s’y fit tuer.

Son frère Philippe-Emmanuel, né en 1686 à Castelnau, devint seigneur de Castelnau et de Graulhet.

Une lettre de Juin 1702 signée de Louis XIV le nommait colonel du régiment qu’avait commandé son frère Etienne de Crussol. Il partit donc combattre en Flandres et s’y distingua.

C’est un personnage pittoresque que le peuple respectait. Lors d’un soulèvement provoqué par la misère dans le Quercy en 1707, on vit près de quarante mille paysans révoltés ravager le pays autour de Cahors. Mais, arrivés devant le château de Saint-Sulpice, ils baissèrent le drapeau en signe de respect et renoncèrent à toute attaque.

C’est aussi une tête un peu folle. Lors d’un bal masqué chez la comtesse de Panat à Albe, en 1725, Philippe de Crussol se prit de querelle avec le seigneur de Saliès. On réussit à séparer les belligérants. Six jours après, à la messe des Carmes (Palais de Justice actuel), il l’attaqua de nouveau et tua de Saliès d’un coup d’épée sur les marches de l’église. Il fut condamné à mort par contumace mais des lettres de grâce lui furent données par Louis XIV.

Aux Etats du Languedoc, il faut lui faire comprendre qu’il y a plus titré que lui pour aprader aux premières places. A Albi, il obtient satisfaction en 1728, il a le second rang après Monseigneur l’Evêque.

Cette noblesse du XVIIIème siècle ne cesse de revendiquer des droits : Philippe de Crussol prétend ressusciter d’anciens droits qu’il fait rechercher dans les vieux grimoires. Il faut l’intervention de Louis XV en 1745 pour lui interdire de rétablir des péages établis par Sicard Alaman et abandonnés depuis la fin du Moyen Âge !

Philippe de Crussol eu quatre enfants de Marie-Antoinette d’Estaing qu’il avait épousée en 1715. Il mourut en 1761 à Paris.

Son fils Charles-Emmanuel-Marie résida le plus souvent dans son château de Crins. Il se montra encore plus dur que son père avec ses fermiers avec lesquels il fut très souvent en procès. Il se signala pour son zèle à maintenir ses privilèges et prérogatives, sommant les curés et vicaires sur ses terres de rendre les honneurs dus à leur seigneur dans toutes les églises de sa seigneurie. Il obtint satisfaction par un arrêt du parlement de Toulouse en 1763 alors que les idées révolutionnaires commençaient à monter !

Il dilapida peu à peu la grande fortune que lui avaient laissée ses ancêtres et fut contraint de vendre le domaine de Castelnau au Marquis de Pequeyrolles, président au parlement de Toulouse. Plus tard, il vendit le titre de baron et l’entrée aux Etats du Languedoc, attachés à cette terre, au Marquis Pierre de Bernis, frère du cardinal, qui transféra les prérogatives sur sa seigneurie de Cadalen.

Ces ventes eurent lieu vers 1770.

Il mourut quelques années après dans son château de Crins.

A sa mort, sa sœur Marie-Louise-Victoire, épouse du Comte de Séneterre, héritera de Grauhet qu’elle conservera jusqu’à la révolution.

En 1790, une foule hurlante saccagea le château de Crins.

Qu'est devenu Castelnau de Bonafous ?

Lors de la donation à Sicard Alaman en 1234, la seigneurie de Castelnau de Bonafous s'étendait sur 7 657 hectares et comprenait : Castelnau, Sainte‑Croix, Villeneuve, Saint‑Sernin‑Lés‑Mailhoc, Castanet et Bernac.

Jusqu'à la Révolution, ce fut une puissante baronnie dont le titre donnait droit d'entrée aux Etats Provinciaux de Languedoc. La Révolution fit de Castelnau, qui s'appela alors Castelnau du Tarn, un chef lieu de canton et le siège d'une perception. Mais, Castelnau n'est bientôt plus qu'une commune. L'ancienne baronnie a éclaté en communes indépendantes : Bernac en 1790, puis Villeneuve et Saint‑ Sernin. En 1810, la commune n’occupe plus qu’un espace de 3 743 hectares. En 1833, Cagnac est séparé de Castelnau et donné à Saint-Sernin. Castelnau s’étend alors sur 2 690 hectares.  En 1893, Sainte‑Croix demande son émancipation qu’elle obtiendra en 1950.

Aujourd'hui, la commune de Castelnau-de-Lévis s'étend sur 2 142 hectares.

Le château fut vendu en 1818 par ses derniers propriétaires. Les acquéreurs n’y virent qu’une carrière à exploiter…

 Dans la nouvelle édition de Dom Vayssète par Du Mège vers 1850, on lit :

 

« Le château de Bonafous, nommé depuis Castelnau de Lévis, existait dans son entier, il y a trente ans. Nous en avons vu, pour la première fois, les ruines en 1821. Il occupait le sommet d’une hauteur escarpée sur la rive droite du Tarn. On y parvenait par des rampes taillées dans la masse de la colline et ses approches étaient défendues par plusieurs ouvrages, de hauts murs l’enveloppaient ; deux tours se dressaient vers le couchant et rendaient de ce côté l’attaque très difficile. Au centre, s’élançait une haute tour svelte, élégante, légère, couronnée de mâchicoulis et de créneaux. Chacune de ses faces était revêtue de pierres taillées avec soin. Aujourd’hui, cette tour reste presque seule au milieu des ruines du château, témoin muet des grandeurs du Moyen-Âge »

BIBLIOGRAPHIE ‑ Clément Compayré, Guide du voyageur dans le département du Tarn - Revue historique, scientifique et littéraire du département du Tarn - Colonel Brieussel, La tour de Castelnau‑de‑Lévis dans le Bulletin de la Société des Sciences, Arts et Belles‑Lettres du Tarn - Charles Higounet, Les Alamans seigneurs bastides et péagers du XIIIe siècle dans Annales du Midi, repris dans Paysages et villages neufs du Moyen Age 1975 - Henri‑Paul Eydoux, Châteaux fantastiques - Sylvie Caucanas, Castelnau‑de‑Lévis (Tarn), Une seigneurie de l'Albigeois du XIIIè au XVe siècle, thèse de l'École des Chartes, 1977 aux Archives départementales du Tarn - Sylvie Caucanas, La seigneurie de Castelnau‑de‑Lévis aux XIVe et XVe siècles dans Annales du Midi, janvier ­mars 1978 - Sylvie Caucanas, La charte de franchise de Castelnau‑de‑Lévis dans Revue duTarn - Jean Roques, Castelnau‑de‑Lévis, Albi, 1981 - Yves Bruand, Le Congrès d'Albigeois 1985 et Ginette Haber, Castelnau de Lévis, son histoire.